La province

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Elle a les yeux d’un Rhône coulant des bords de Seine
Le sourire de Gascogne d’un café de Compiègne
La vieillesse d’un Bourgogne au brame sur les plaines
Du chant d’une cigogne chantant sur les Cévennes
Elle a le cœur maquis du gilet résistant
D’un Jean Moulin tapi dans les Vercors du temps
D’une nappe Vichy soudain tachée de sang
Non, elle n’est pas Paris, elle est le paysan
Elle a les yeux d’un bar tabac du populaire
Montluçon ou mon bar font les mêmes prières
C’est Buffon, c’est Rousseau, c’est Balzac, c’est Flaubert
À ceux qui se lèvent tôt, c’est le brame d’un cerf
C’est le chant du rouge-gorge puis du martin-pêcheur
C’est le chant des manifs du peuple travailleur
Qu’il beau temps ou qu’il pleuve des rivières sur nos cœurs
Dans les gorges des fleuves, c’est quand le soleil pleure
C’est l’enfant de la Drôme au clocher de Provence
C’est quand la Baie de Somme ressemble à mon enfance
C’est le fort de Bretagne, c’est Saint-Malo qui trinque
Des villes ou des campagnes, c’est le chant des complaintes
C’est quand tout se finit au fond d’un Finistère
Qu’on n’a plus d’autre choix que combattre les mers
Des plaines ou des montagnes, en été en hiver
Oui, c’est quand l’eau de vie fait combattre l’enfer
Elle a le cœur des plaines et les yeux bord de mer
Des populaires sueurs, des travailleurs des terres
De Marseille à Toulouse, elle fait trinquer les verres
De l’aube qui vous chante les patois de la terre
De l’Ardèche aux Ardennes jusqu’au fond de l’Ariège
Elle est quand, sur Paris, soudain tombent les neiges
C’est quand La Réunion vous enfante un Bas-Rhin
C’est comme une Martinique soudain qui tend la main
Ils l’appellent la Province, je l’appelle la France
C’est le terre travailleur puis c’est cette enfance
Piano jouant Chopin dans les tours des misères
Pour égayer un peu le triste populaire
C’est pisser dans la Meuse que creuse une rivière
Un ruisseau pour aller, oui, voir le bord de mer
C’est le doux du Jura, c’est la Marne en Lozère
Au Luberon qui chante, oui, l’accent de mon père
Elle a les yeux froncés ou la peau de l’ébène
Elle est des Indochine ou de Mostaganem
Elle est le sang mêlé, oui, puisque dans nos veines
Se marient les mêmes sangs, de l’ivoire à l’ébène
Qu’importe national, elle restera l’internationale
Terre d’asile, oui, toujours à mes frères
Elle est de tous pays la plus belle des terres
À qui cherche un abri, garde le cœur ouvert
Et si toujours se pointent les discours pourritures
Pour virer les pédés, les blacks, quand les ordures
Nourrissant des misères, oui, vous jettent en pâture
Ceux qui ne portent pas les mêmes traits aux figures
À ces gens-là il faut tendre le doigt bien haut
Il faut porter toujours, oui, l’unique drapeau
La France face à l’humain, elle ouvre son manteau
Pour donner le sein aux orphelins des drapeaux
Elle est pourquoi je tiens mon histoire bout de bras
Contre tous les fascismes qui gangrènent je crois
Sur les terres imbéciles de leur paranoïa
Contre tous les dandysmes qui gangrènent tu vois
De ces tristes Paris qui se rêvent en London
Qui se rêvent Amérique puis qui pensent que freedom
Sonne mieux que liberté, tristesse de gavage
Au goulot qu’on enfonce dans les cerveaux propage
Toujours la même histoire, alors garde le poing
Levé toujours gamin, levé contre l’empire du rien
Pour l’histoire de ta mère, pour l’histoire de ton frère
Pour celle de ton voisin, pour celle de l’étrangère
Face à l’humain toujours qui voudrait répéter
Le pire de sa nature pour nourrir les charniers
Il n’y a que l’union mariant la différence
Oui qui toujours a fait l’histoire de notre France
Il n’y a que l’union mariant la différence
Oui qui toujours a fait l’histoire de notre France

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